Archive for septembre 2011
septembre 14, 2011
« Une année consacrée. À qui ? dis-je. À ça dit-il. Je vais faire «ça» un an et sans pourquoi. De l’avent jusqu’après Pentecôte, aux couleurs liturgiques tel jour en rouge tel jour la sainte au cœur violet je faisais ça un an il a presque cinquante ans, je faisais le portrait des tout premiers temps, et c’était le printemps dans le tableau, tout intense, surchargé, on entre dans l’an par l’avent comme dans une église, pas seulement dans une église si sainte, mais le même sien, inséparables mystères, les autres religions et philosophies à la célébration desquelles la peinture prenait part, au milieu des psaumes, et posées sur l’autel de la toile elles faisaient courir rouge vert noir violet les phrases des essais et des exercices, la peinture était violente et exaltée quand je l’ai fait au petit matin du monde. Je vois qu’Hegel, Hölderlin, Schlegel se lèvent, ils vont au séminaire protestant, la philosophie avec le poésie, ils écrivent des lettres d’un esprit à l’autre esprit, elles font Berlin Heidelberg Weimar Bayreuth Magdebourg et se posent sur les extrémités de la toile d’Europe je suis Hölderlin, Schlegel, Hegel, «nous allons réaliser le royaume de Dieu de la philosophie» disent-ils, à l’avent du monde lumineux, aussitôt je copie, les couleurs de leurs pensées en noir ou vert ou violet selon l’heure je vois Hegel regarder Goethe regardant le mur blanc avec des prismes de Büttner et ne voyant rien que du blanc et toutes les fois, dit-il, Hegel, que j’ai à faire avec cette matière je vois devant moi le phénomène primitif, Eurer Excellenz, vous-même regardant mur blanc et ne voyant que du blanc.»
Hélène Cixous, Le Tablier de Simon Hantaï, suivi de H. C. S.H. Lettres, Galilée, Paris, 2005, p. 13-14.
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septembre 14, 2011
Simon Hantaï, Peinture (Écriture rose), Sans titre ; Écriture, 1958-1959, Encres de couleur, feuilles d’or sur toile de lin fine, 2 morceaux cousus, 329,5 x 424,5 cm, MO.D. au R. B.G. : S.H. 1958-1959, Don de l’artiste 1985, Musée National d’Art Moderne, via Centre Pompidou catalogue en ligne
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septembre 10, 2011
334. Il faut apprendre à aimer. – Voici ce qui nous arrive dans le domaine musical : il faut avant tout apprendre à entendre une figure, une mélodie, savoir la discerner par l’ouïe, la distinguer, l’isoler et la délimiter en tant qu’une vie en soi : ensuite il faut de l’effort et de la bonne volonté pour la supporter, en dépit de son étrangeté, user de patience pour son regard et pour son expression, de tendresse pour ce qu’elle a de singulier ; – vient enfin le moment où nous y somme habitués, où nous l’attendons, où nous sentons qu’elle nous manquerait, si elle faisait défaut ; et désormais elle ne cesse pas d’exercer sur nous sa contrainte et sa fascination jusqu’à ce qu’elle ait fait de nous ses amants humbles et ravis, qui ne conçoivent de meilleure chose au monde et ne désirent plus qu’elle-même, et rien qu’elle-même. – Mais ce n’est pas seulement en musique que ceci nous arrive : c’est justement de la sorte que nous avons appris à aimer tous les objets que nous aimons maintenant. Nous finissons toujours par être récompensés pour notre bonne volonté, notre patience, notre équité, notre tendresse envers l’étrangeté, du fait que l’étrangeté peu à peu se dévoile et vient s’offrir à nous en tant que nouvelle et indicible beauté : – c’est là sa gratitude pour notre hospitalité. Qui s’aime soi-même n’y sera parvenu que par cette voie : il n’en est point d’autre. L’amour aussi doit s’apprendre.
Friedrich Nietzsche, Le gai savoir, 1882, Traduits de l’allemand par Pierre Klossowski, Gallimard, Paris, 1982, p. 223.
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septembre 10, 2011
284. La foi en soi-même. – Peu de personne au demeurant ont la foi en eux-mêmes : – et parmi ce petit nombre, les uns la reçoivent de façon innée comme une cécité utile ou un partiel obscurcissement de leur esprit – (que ne verraient-ils s’ils pouvaient voir au fond d’eux-mêmes !) les autres la doivent acquérir d’abord : tout ce qu’ils fond de bien, de valable, de grand, sert premièrement comme argument contre le sceptique logé en eux : il s’agit de convaincre celui-ci, ou de le persuader, et pour cela il faut presque du génie. Ce sont les grands insatisfaits d’eux-mêmes.
Friedrich Nietzsche, Le gai savoir, 1882, Traduits de l’allemand par Pierre Klossowski, Gallimard, Paris, 1982, p. 194.
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septembre 10, 2011
Un portrait, on s’en est peu à peu aperçu, n’est pas ressemblant parce qu’il se ferait semblable au visage, mais la ressemblance ne commence et n’existe qu’avec le portrait, et en lui seul, elle est son œuvre, sa gloire ou sa disgrâce, exprimant ce fait que le visage n’est pas là, qu’il est absent, qu’il n’apparaît qu’à partir de l’absence qui est précisément la ressemblance.
Maurice Blanchot, L’amitié, p. 43.
Jean-Luc Nancy, Le regard du portrait, Galilée, Paris, 2000, p. 37.
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septembre 9, 2011
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Andrei Tarkovski
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septembre 9, 2011
Pour le photographe spectateur-opérateur, le présent de la perception de ses images coexiste avec le passé contemporain du souvenir de leur avènement, depuis l’en-deça de la saisie jusqu’à l’apparition. À l’encontre des conceptions empiristes ordinaires, cela signifie que, devant ses propres images, le photographie n’est pas directement et simplement renvoyé au passé révolu de l’état de choses figuré, mais que celui-ci se mêle aux souvenirs (le passé contemporain) des étapes, des péripéties, des circonstances qui ont présidé à leur réalisation. Un présent (celui de la perception) est ainsi contemporain d’un passé (celui du souvenir) par le truchement de « la mémoire qui, pratiquement inséparable de la perception, intercale le passé dans le présent.* »
André Rouillé, La photographie, Gallimard, 2005, pp. 277-278.
* Henri Bergson, Matière et Mémoire (1939), p. 76.
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