Posts Tagged ‘exister’

avril 21, 2012

Friedrich Nietzsche, Photograph from the series « Der kranke Nietzsche » by Hans Olde, between June and August 1899, via wikipedia

exister

avril 13, 2012

Pourrions-nous penser aujourd’hui qui nous sommes et où nous en sommes sans impliquer l’idée d’une existence qui se développerait par delà le bien le mal ? Sommes-nous pour autant fondés à admettre toute existence possible ? Le propos nietzschéen auquel ces propositions font référence n’a jamais été d’encourager l’absence de tout discernement. Si vivre, selon Nietzsche, ce n’est pas se soumettre à un devoir (c’est-à-dire vivre d’une vie qui ne se demanderait pas comment vivre, la réponse étant obligée, c’est-à-dire donné d’avance), ce n’est pas pour autant tout accepter. Il n’est pas d’existence digne de ce nom qui puisse se passer de préférer d’un côté et de refuser de l’autre. Vivre, pour Nietzsche (je dirai aussi volontier exister), c’est pouvoir préférer et refuser. Et donc distinguer, faire des différences (le moindre refus implique en effet du discernement : on ne peut rien refuser dans l’indistinction et l’indifférence).

Ne pas être tenu à une condition donnée, ne pas être obligé à un mode de vie déterminé, c’est exister. Le problème est de comprendre comment ce détachement foncier de l’existence par rapport à a condition se lie à l’exercice d’un discernement, c’est-à-dire à la possibilité de préférer et de refuser.

Pierre-Damien Huyghe, « Exposer ou exploiter l’art », in Le jeu de l’exposition, sous la direction de Jean-Louis Déotte, Pierre-Damien Huyghe, Paris, Harmattan, 1998, p. 105.

activation d’une œuvre d’art

décembre 1, 2011

Pour lui les œuvres sont des artefacts à fonctionnement symbolique : Ce sont des ensembles de marques au sein de systèmes symboliques. Elles existent quand des interprètes les font fonctionner au sein de ces systèmes. Elles doivent donc, pour être reconnues et exister, être activées en tant que symboles au sein de systèmes. L’activation d’une œuvre d’art consiste dans toutes les procédures grâce auxquelles elle existe : exécution, diffusion, exposition, édition, restauration, enregistrement, traduction : « Ce que les œuvres sont dépend en dernier ressort de ce qu’elles font*. » Et c’est aux interprètes de les faire fonctionner, de les activer. 

Yves Michaud, L’art à l’état gazeux, Paris, Éditions stock, 2003, p. 161.

* Goodman (N.) Manières de faire des monde (1978), trad. franç., Nîmes, Éditions Jacqueline Chambon, Collection « Rayon Art », 1992, p. 7.

image infographique

février 5, 2011

Révolution dans le regard, en tout cas. La simulation abolit le simulacre, levant ainsi l’immémoriale malédiction qui accouplait image et imitation. Elle était enchaînée à son statut spéculaire de reflet, calque ou leurre, au mieux substitut, au pire supercherie, mais toujours illusion. Ce serait alors la fin du millénaire procès des ombres, la réhabilitation du regard dans le champ du savoir platonicien. Avec la conception assistée par ordinateur, l’image produite n’est plus copie seconde d’un objet antérieur, c’est l’inverse. Contournant l’opposition de l’être et du paraître, du semblant et du réel, l’image infographique n’a plus à mimer un réel extérieur, puisque c’est le produit réel qui devra l’imiter, elle, pour exister. Toute la relation ontologique qui dévaluait et dramatisait à la fois notre dialogue avec les apparences depuis les Grecs s’en trouve renversé. Le « re » de représentation saute, au point d’aboutissement de la longue métamorphose où les choses déjà apparaissaient de plus en plus comme les pâles copies des images.

Régis Debray, Vie et mort de l’image, Gallimard, 1992, p. 301.

pitrerie

décembre 28, 2010

Impossible d’imaginer Dada sans pitreries ; aussi l’origine du mouvement Dada de Berlin, est-elle d’une rafraîchissante absurdité. Le 17 novembre 1918, pendant une messe à la cathédrale de Berlin, Baader se fit remarquer en hurlant «Jésus-Christ, on n’en a rien à faire», a près quoi il fut bien entendu écarté du lieu. Puis loin de laisser reposer l’incident, il le propulsa au contraire dans les sphères du débat public à coup de lettres de lecteur. Dada fut la première manifestation d’une idée qui s’imposera tout particulièrement à Berlin, l’idée que la culture du spectacle n’a absolument rien à voir avec la qualité de ce qui peut éventuellement être représenté, mais qu’elle diffuse massivement ce simple constat : «J’existe, je suis celui qui a de l’importance». Dada a anticipé certains mécanismes qui accompagnent la célébrité aujourd’hui encore. Le fait que la part de non-sens soit de nos jours plus importante que la part de sens transmis c’était le fondement de la réflexion.

Rainer Metzger, Berlin les années vingt, Hazan, 2006, p. 99.