Posts Tagged ‘guerre’

août 3, 2012

Loin du Vietnam, 1967.

irreprésentable

juillet 3, 2012

Gilles Peress (1946) expose des photographies grand format montrant l’atrocité des épurations et des génocides comme en Bosnie et au Rwanda. Il privilégie les gros plan et les images nettes visant à accroître la dureté des scènes captées. C’est un choix esthétique. Quels que soient le bien fondé de sa dénonciation et l’authenticité de sa révolte, on peut lui préférer la posture de l’artiste chilien Alfredo Jarr (1956). Celui-ci refuse l’exhibition et la monstration brutale. Il expose 550 boîtes en carton, closes, recelant chacune une photographie de victimes de guerre. L’horreur est bien là, mais cachée. Pour y accéder, il faut lire sur le couvercle la description du cliché. Ni documentaire ni reportage, le travail de Jarr constitue une redoutable dénonciation de l’exploitation des images médiatiques, de celles qui saturent, parfois jusqu’à la nausée, les informations télévisées et internet. Le pouvoir des mots ne serait-il pas parfois aussi corrosif que le choc des photos, dès lors qu’il s’agit de l’irreprésentable ?

Marc Jimenez, La querelle de l’art contemporain, Gallimard, Paris, 2005, p. 293.

juillet 3, 2012

phospiration:

Hue, Vietnam, February 1968 – Don McCullin

A dead North Vietnamese soldier lies next to his scattered possessions. After US Marines had finished searching his body for souvenirs, Don McCullin arranged the possessions for the purpose of the photograph, the only occasion on which he deliberately arranged a scene as a photojournalist.

 – Imperial War Museum, London (This exhibition is well worth a visit.)

voyeur obsène

juillet 2, 2012

Le photographie Donald McCullin, qui à « couvert » les conflits des années 1960-1982 (à Chypre, au Vietnam, en Irlande du Nord, au Biafra, au Liban…) a déclare aimer le « pictorialisme », la photo qui ressemble à la peinture. En même temps, il voulait être « le photographe de guerre le plus dur, le plus cru, le plus violent qui soit », pendant que son témoignage contribuerait à changer le monde… Plus il a cessé de croire que ses photographies puissent être utiles à autre chose que sa propre légende et s’est considéré, du coup, comme un « voyeur obscène » : « Je hais mes photos de guerre. Avoir fait ce métier si longtemps est la honte de ma vie ». Aussi s’est-il retiré du photojournalisme, pour se consacrer aux natures morts, aux photos d’arbres, de ciels, de nus*. Mais nos retraits et nos retraites ne donnent pas congé aux brutalités du monde. L’événement nous rattrape. Pire, il surgit au sein du cycle monstrueux des image ordinaires : déjà cadré, déjà commenté, déjà présenté, avec sa dramaturge, avec sa photogénie.

Jean Galard, « L’art sans œuvre », in L’œuvre d’art totale, Paris, Musée du Louvre / Gallimard, 2003, pp. 177-178.

* Donald McCullin, Home coming, Londres, 1979 ; Unreasonable behavior, Londres, 1990. Voir aussi Michel Guerrin, « Don McCullin, toute une vie en voir », Le Monde, 22 novembre 2001. Don McCullin est retourné au photojournalisme, sur d’autres fronts, en photographiant des victimes du sida, en Afrique du sud, en Zambie.

traduction

avril 1, 2012

Nous sommes alors, par la traduction, à cheval sur des frontières. Ces approches complémentaires pourraient être autant d’atouts pour sortir de l’impasse épistémologique et de la crise cognitive dans laquelle se trouve la planète après que les conséquences de la fin de la Guerre froide aient convergé avec les effets à retardement de la décolonisation, le tout résultant en une arrogance de l’Occident conjuguée avec l’humiliation historique en face et les actes terroristes qui on déclenché l’hystérie anti-terroriste et sécuritaire globale. Peut-on entendre, dans ce tintamarre des armes, le silence de la plèbe* ? Celui des anciens colonisés ? Celui des décolonisés qui, maintenant, se tournent vers des projets alternatifs (Aihwa Ong) sans vouloir s’enfoncer dans la nostalgie (post) coloniale ou d’une réaction à elle ? La dépolitisation et la désémantisation font partie de l’effort d’éliminer, avant même toute manifestation du politique, toute concurrence dans la sphère du pouvoir.

Rad Ivekovic, Traduire les frontières. Langue maternelle et langue nationale, 2008, via resaue-terra.eu

* R. Ivekovic, “Les paradigmes postcoloniaux par la langue”, in Marie-Claude Smouts, La situation postcoloniale, Paris, Les Presses de Sciences Po 2007, pp. 352-357 ; -« Resisting Absolute Translation. For Politics of Culture », in Culture & Politics : Summer Research University in Chilhac, 2-8 September 2007, Taipei-Chilhac, pp. 21-26 ; -« Résister à la traduction absolue comme le rhinocéros »/Resisting absolute translation like the rhinoceros », Livraison n° 8, été 2007 (sans numérotation de pages) ; -« Langue coloniale, langue globale, langue locale », in Rue Descartes n° 58, 2007, pp. 26-36 ; -« Traduire la violence de la plèbe/ Translating violence », sous la dir. de R. Ivekovic (articles par Rita Kothari, Anna Nadotti, Dongchao Min, Joyce Liu, Jon Solomon, Sandro Mezzadra), http://www.eipcp.net http://translate.eipcp.net/transver…, novembre 2007 ; -« Une Europe des mondes multiples », Cahiers critiqwww.eipcp.net http://translate.eipcp.net/transver…, novembre 2007 ; -« Une Europe des mondes multiples », Cahiers critiques de philosophie n° 5, 2007, p. 2007, pp. 107-125.

mars 14, 2012

Gillo Pontecorvo, La bataille d’Alger, 1966

mars 13, 2012

Hans Haacke, Und ihr habt doch gesiegt (Et pourtant, vous étiez les vainqueurs), 1988, Graz, Autriche, via imagesanalyses.univ-paris1.fr

« Les vaincus de Styrie : 300 tziganes tués, 2500 juifs tués, 8000 prisonniers politiques tués ou morts en captivité, 9000 civils tués pendant la guerre. 1200 disparus, 27900 soldats tués. »

alter ego

février 9, 2012

La communication « naturelle » exige donc une proximité audiovisuelle, des intervalles ou un territoire assez restreints, mais aussi, un nombre réduit de communicants, possédant en commun des vocalisations ou autres signaux sémantiques*.

Jusqu’à une époque récente, nos mode de connaissance et de représentation (arts, sciences, religions, guerre, activités sociales et sexuelles, etc.) dépendaient autant de nous-même (corps propre) que de cette capacité inouïe à nous dédoubler en nous identifiant à cet alter ego, littéralement cet autre-moi qui nous permettait de « voir » ou plutôt de concevoir le réel a distance et faisait que notre point de vue possédait un relief social naturel. Un peu comme le faible écartement des yeux d’un même individu crée le relief de l’image qu’il perçoit, sa stéréoscopie, grâce au léger décalage spatiotemporel de la motilité oculaire.

Paul Virilio, L’art du moteur, Paris, Galilée, 1993, p. 21.

* D. L. Cheney et R. M. Seyfarth, « Truth and Deception in Animal Communication in Cognitive Ethology », Lawrence Erlbaum Ass., 1991.

déréalisation

décembre 8, 2011

De fait, la dissuasion est une figure majeure de la déinformation ou, plus exactement, selon la terminologie anglaise, de la déception. Une figure que la majorité des hommes politiques s’accorde à estimer préférable à la vérité de la guerre réelle, le caractère virtuel de la course aux armements et de la militarisation de la science étant perçu, malgré les dégâts économiques, comme « bénéfique », au détriment du caractère réel d’un affrontement qui aboutirait à un désastre immédiat. Même si le sens commun s’accorde à reconnaître le bien-fondé du choix de la « non-guerre nucléaire », nul ne peut s’empêcher de remarquer que ladite dissuasion n’est pas la paix, mais une forme relativiste de conflit  : un transfert de la guerre de l’actuel au virtuel, une déception de la guerre d’extermination mondiale dont les moyens mis en œuvre et sans cesse perfectionnés pervertissent l’économie politique, entraînant nos sociétés dans une déréalisation généralisée qui affecte tous les aspects de la vie civile.

Paul Virilio, La machine de vision, Paris, Galilée, 1988, pp. 140-141.

sauver le monde

novembre 23, 2011

A cette période, ce groupe se faisait tout au plus remarquer par un petit scandale, car il cherchait la provocation et attaquait la situation présente qui, malgré son caractère hautement civilisé, n’avait pas réussi à empêcher la guerre mondiale. Dada était « socialo-pacifiste », pour reprendre les mots de Marcuse ; mais il n’était certainement pas eschatologique. Ce que fabriquaient le général dadaïste Johannes Baader et ses acolytes Raoul Hausmann, Hannah Höch et Richard Huelsenbeck, bientôt rejoints par George Grosz, n’avait plus rien à voir avec une volonté de sauver le monde ou avec des visions prémonitoires de la grande Apocalypse.

Rainer Metzger, Berlin les années vingt, Hazan, 2006, p. 98.