Posts Tagged ‘nuit’

choc

janvier 21, 2011

Baudelaire est le poète qui doit affronter la dissolution de l’autorité de la tradition dans la nouvelle civilisation industrielle est se trouve donc dans la situation de devoir inventer une nouvelle autorité : et il s’est acquitté de ce devoir en faisant de l’intransmissibilité même de la culture une nouvelle valeur et en plaçant l’expérience du choc au centre du travail artistique. Le choc est la force de heurt dont se chargent les choses quand elles perdant leur transmissibilité et leur compréhensibilité à l’intérieur d’un ordre culturel donné. Baudelaire comprit que si l’art voulait survivre à la ruine de la tradition, l’artiste devait essayer de reproduire de l’expérience du choc : de cette façon il réussirait à faire de l’œuvre le véhicule même de l’intransmissible. Par la théorisation du beau comme épiphanie instantanée et insaisissable ( “un éclair … puis la nuit !” ), Baudelaire fit de la beauté esthétique le chiffre de l’impossibilité de la transmission. Nous sommes ainsi en mesure de préciser en quoi consiste la valeur-extranéation dont nous avons vu qu’elle était à la base tand de la citation que de l’activité du collectionneur, et dont la production est devenue le devoir spécifique de l’artiste moderne : Ce n’est rien d’autre que la destruction de la transmissibilité de la culture.

Giorgio Agamben, L’homme sans contenu, Circé, traduit de l’Italien par Carole Walter, 1996, p. 140.

La nuit

décembre 28, 2010

Juste après-guerre, Max Beckmann sondait déjà la réalité avec des mises en scène choquantes comme par exemple dans La nuit de 1919. La nuit jette regard impitoyable dans une pièce saisie par l’horreur. On distingue un groupe d’hommes, dans lequel chacun torture son prochain les membres des corps sont contorsionnés et les traits du visage déraillent, mais ce qui est véritablement troublant, c’est la tranquille normalité dans laquelle s’inscrivent ces sinistres agissements. L’homme au centre de la peinture porte un bandage à la tête et s’emploie en même temps à tordre le bras d’une pauvre créature dont la bouche grande ouverte laisse échapper un cri ; mais cet homme au centre, qui cumule les fonctions de victime et de tortionnaire, montre encore un troisième facette car il fume sa pipe avec une délectation extrême. C’est comme si cette «nuit» pouvait se reproduire toutes les nuits.

Rainer Metzger, Berlin les années vingt, Hazan, 2006, p. 110-111.